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Sardaigne Au pays de la merca et de la fregola

La Sardaigne est un peu la Corse de l’Italie, avec ses villages montagnards, la Méditerranée comme horizon et des traditions solidement ancrées.

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Avec un œil rieur et de la bonne volonté, Andrea pose de profil. Il tient à bout de bras son poisson, emmailloté dans un tressage d’herbes aromatiques, rehaussé de deux anses, un peu comme s’il portait un petit sac de voyage. Ce n’est pas un poisson d’avril à la sauce sarde mais la merca, une très ancienne tradition remontant aux Phéniciens, un mode de conservation rustique et ingénieux des mulets pêchés dans les lacs de Cabras. « Le poisson est cuit à l’eau salée et après l’avoir emballé dans les herbes, on peut le garder comestible environ un mois », explique Andrea, qui est l’un des derniers à Cabras à savoir faire la merca comme il se doit. Il tient ce talent de son père.

Lit d’herbes aromatiques

Le poisson aux reflets argentés, comme la Méditerranée quand le soleil se couche, est une des ressources de cette petite ville de la côte occidentale. Seules les femelles sont pêchées. La poche des œufs, une fois salée puis longuement séchée devient la poutargue. Cette gourmandise, une pâte collante de la couleur de l’ambre avec un goût extrême de saveurs marines, est chère à bien des Méditerranéens. « On la tranche en fines lamelles sur la fregola, une de nos variétés de pâtes, taillée comme de gros grains de riz », précise Daniela Meloni, aussi bonne cuisinière que navigatrice.

 

Sur les collines, les chênes-lièges ploient sous la force du mistral et dans les rues des villages perchés, les veuves marchent habillées de noir, les cheveux cendrés noués en chignon. Dans les montagnes, les vaches rouges, leurs petits jamais loin, presque sauvages, se perdent dans les grandes herbes émaillées de chardons flamboyants. Les éleveurs ne font que le commerce des veaux. Les femelles finissent par mourir en solitaire dans la montagne, comme les vieux éléphants dans la savane.

Au haut d’un vallon, un troupeau de brebis est contenu dans un enclos muré. C’est l’heure de la traite du matin, à ciel ouvert. Le lait se transforme bientôt en ricotta, à déguster sans apparat ou avec juste une larme de miel de la garrigue. C’est dire si dans cette île, plus proche de la Corse que de l’Italie, les traditions sont tenaces, encore davantage à l’ouest, frappé par les vents et, dès lors, épargné par l’appétit des promoteurs immobiliers touristiques.

Jean-Paul frétillet

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